Antoine Berjon – Fleurs et Fruits dans une Corbeille d’Osier (1810)


Arrosés de Miel

Emma Krouse

Je remarque souvent les fleurs. 

Dans la rue, en bouquets, ou cultivées intentionnellement dans un jardin.

C’est nécessaire de mettre ces fleurs dans les cheveux, pour amener la terre à la tête

Quand j’étais jeune, je soufflais sur les étamines de la tige. 

Un souvenir que je partage avec tous ceux qui ont eu un moment. 

Je souriais pendant que les étamines s’envolaient pour renaître. 

Je n’ai pas compris la grandeur de cet acte. 

Mon souffle recherchait un nouveau départ. 

Il libérait la vie, et le vent les emportait quelque part que je ne connaîtrai jamais. 

Il déclenchait le début d’une nouvelle vie. 

Les fleurs sont une constante.

Elles dansent dans le vent sans destination, me suivant de la naissance à la mort. 

Comme nous 

Elles poussent, nous grandissons.

Elles rayonnent, nous brillons.

Elles se fanent et nous mourons. 

Les événements importants sont marqués par des fleurs.

À ma naissance, on m’a offert des fleurs pour ma présence sur terre. 

À ma mort, les fleurs vont célébrer ma vie, avec leur vie.

Tout au long de ma vie, les fleurs ont ponctué tous mes moments de bonheur et de tristesse, 

Elles célébreront mes victoires et atténueront les échecs. 

Les fleurs ont été les témoins silencieux de mon parcours, illuminant mes jours sombres et ajoutant de la couleur à mes meilleurs jours.

Lorsque je me suis blessée, les remèdes ont rétabli mon corps, 

tandis que les fleurs de mes proches ont apaisé mon esprit. 

Quelles que soient les circonstances, les fleurs guérissent l’âme et l’esprit. 

Leur odeur est comme un parfum pour le temps, 

rendant les moments importants encore plus agréables. 

Les couleurs nous rappellent l’abondance de la beauté dans le monde

La délicatesse représentant une manière plus douce d’être. 

Pensée qui en ramène une autre… 

Je me souviens du début de l’été pendant mon enfance. 

Les arbres étaient pleins de feuilles vertes émeraude  

L’herbe s’est inspirée des arbres et a poussé sans honte.

Le soleil brûlait comme la plus douce des bougies.

Je me suis souvent assise sur une couverture sous ce soleil, 

Sur cette herbe et entourée de ces arbres. 

Alors, ma mère m’apportait des fruits coupés.

Des raisins, des melons et quelques fraises- mes coups de cœur.

Elle les arrangeait toujours sur une assiette, en forme de visage souriant, arrosés de miel. 

Elle s’asseyait avec moi pour manger les fruits, et nous mangions ensemble.  

Tout en mangeant nous discutions de notre enthousiasme pour les mois à venir. 

Comment le fruit deviendrait plus sucré, 

Comment le soleil deviendrait plus chaud,

Comment les jours s’allongeaient. 

Toutes les conversations étaient émaillées de rires et d’amour.  

Évidemment, le temps allait passer, mais nous ne le suivions pas. 

Le seul indicateur de l’avancement de la journée serait le déplacement du soleil.

Elle m’a toujours encouragé à prolonger les moments de tranquillité comme ça. 

Elle disait, “Quand tu grandis, ces moments n’arrivent plus,”

Mais, je ne suis pas d’accord.

Maintenant je suis grande, et les moments de tranquillité viennent comme le vent. 

Très souvent ils sont petits et dispersés, donc il faut être très attentif. 

Parce qu’ils passent comme le soleil, 

ou comme une assiette avec des fruits disposés en forme de visage souriant, arrosés de miel. 

Aujourd’hui, le soleil brûle pour la première fois cette année. 

Tout le monde était tellement heureux, la chaleur rayonnait sur les visages. 

Je me suis retrouvée à réfléchir à cela. 

Comment l’air froid de l’hiver étouffe cette chaleur. 

Le soleil sur le visage nous pousse vers ces moments de tranquillité. 

Quand l’humanité est réduite à l’essentiel par cette chaleur, 

Il nous reste quelque chose qui est comparable aux fleurs. 

Une essence qui recherche des moments de chaleur et de nourriture dans les mains des autres. 

Parce que finalement, nous buvons tous la même eau et restons tous en vie dans le même vase.

Par conséquent, nous devons nous appuyer les uns sur les autres, et partager ces moments. 

Parce que nous partageons un foyer et des subsistances. 

Donc, si l’on a l’impression que les moments de tranquillité ne viennent pas,

 Je dis qu’il faut y aller. 

Car une fleur n’est qu’une fleur, jusqu’à ce qu’elle se retrouve dans vos cheveux,

Et les fruits ne sont que des fruits, 

Jusqu’à ce qu’ils soient coupés et arrosés de miel par quelqu’un que l’on aime